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Discours à l'occasion des 30 ans de la COCOF


Vos Excellences,

Madame la Présidente du Sénat,

Messieurs les Présidents d’Assemblée,

Monsieur le Ministre-Président,

Mesdames et Messieurs les Ministres,

Monsieur le Président du Conseil d’Etat,

Cher.e.s collègues,

Mesdames et Messieurs en vos titres et qualités,


C’est un réel honneur et plaisir pour moi de me tenir devant vous, ce soir, pour mon premier discours de Présidente du Parlement de la Commission Communautaire française.




Mon entrée en fonction coïncide avec le trentième anniversaire de cette institution bien peu connue par la population … Et pourtant, de cette institution dépendent des politiques nécessaires pour le bien-être des Bruxelloises et des Bruxellois, pour leur donner la possibilité de vivre dans la dignité, pour les aider à s’émanciper, pour les protéger, pour les construire. Bref, des politiques riches de sens qui permettent les libertés, l'autonomie, le respect, la démocratie, la solidarité, … toutes ces valeurs qui sont aujourd’hui mises à mal.


L’actualité et surtout les prises de paroles des uns et des autres démontrent le contexte hostile à ces valeurs, que ce soit à l'international, ou chez nous où les récents sondages prédisent une première place pour le Vlaams Belang. Et c’est bien en attisant les peurs et les haines au sein de la population, entre ‘eux ‘ et ‘ nous’ que se crée un terreau destructeur pour notre société. Cette montée des extrémismes n’est toutefois pas nouvelle et a débuté par une banalisation des idées fascisantes. L’usage des idées et de la terminologie des partis d’extrême droite pour contenir ou contrer ces mêmes partis a au contraire contribué à leur essor. Les résultats des élections au Nord du pays ou dans d’autres pays en Europe en sont la preuve. Mais au-delà de l’échec à contrer la progression de ces partis, une autre conséquence pernicieuse de cette banalisation est que ces idées ont traversé le cordon sanitaire et se sont immiscées progressivement dans les discours de certains leaders politiques et journalistes et ont fini par percoler comme une évidence dans les mentalités.


S’il est facile de pointer d’un doigt accusateur les personnes d’autres époques ou d’autres lieux qui par leur silence ou leur complaisance ont permis la montée de dictatures et l’émergence de sociétés non-démocratiques, soyons bien vigilants à ne pas devenir ces personnes que d’autres, d’une autre époque ou d’un autre lieu, pointeront un jour du doigt.

Les droits, la démocratie, les libertés, la solidarité et la tolérance ne doivent pas seulement être défendus mais être étendus ! Et pour atteindre cet objectif, vous êtes des acteurs primordiaux.


Et j’en reviens au début de mon intervention; c’est bien à partir des compétences de la COCOF que nous pouvons, chacun, là où il est, participer à la résistance de la dislocation de nos valeurs en favorisant la construction d’une société où de nouveaux droits, de nouvelles libertés, de nouvelles solidarités seront acquises.


Vous qui travaillez dans les associations pour jeunes, vous qui travaillez dans les écoles, dans la culture, pour les droits des femmes, pour les droits des LGBTQI+, pour les droits des personnes en situation de handicap, pour une meilleure santé pour tous … Sachez que vous travaillez au quotidien pour le bien-être de la population, pour leur donner la possibilité de vivre dans la dignité, pour les aider à s’émanciper, pour permettre à des personnes différentes de se rencontrer, d’échanger, et de se rendre compte qu’au final nous ne sommes pas si différents les uns des autres et que nous pouvons très bien vivre et partager ensemble malgré nos différences. Ce rôle-là, il est fondamental dans notre société et je voudrais vous dire à quel point j’ai du respect et de l’admiration pour le travail que vous effectuez quotidiennement.


Merci à vous tous !


Mais, dans cette salle il y a aussi des femmes et hommes politiques et nous avons aussi un rôle à jouer ! Une des premières notes qui m’a été remise par les services du Parlement de la COCOF disait ceci :

“Depuis sa création en 1989, notre Parlement a fait de la notion de citoyenneté responsable l’un des noyaux de son action”


Avec les membres du Bureau et du Bureau élargi, nous aurons à cœur de poursuivre cet objectif.


D’abord, par la poursuite des ‘jeudi de l’hémicycle’ qui tenaient fort à ma prédécesseur, Julie De Groote, que je salue. Les ‘jeudi de l’hémicycle’ sont des rendez-vous avec la société civile pour mettre en lumière des thématiques spécifiques auprès des parlementaires. C’est un moment d’échange que nous voulons faire perdurer mais que nous voulons aussi faire suivre par un travail parlementaire. Je peux déjà vous annoncer que le Bureau a décidé pour les trois prochains ‘jeudi de l’hémicycle’ de travailler autour des thématiques suivantes : la lutte contre la pauvreté, les violences faites aux femmes avec la question du cyber-harcèlement (qui est une nouvelle forme de violence), et enfin l’effectivité des droits humains et leur évaluation.


Nous poursuivrons aussi le travail avec les écoles et les jeunes, notamment le travail de mémoire sur la seconde guerre mondiale, mais en l’étendant aussi aux enjeux de la décolonisation. Nous voulons ouvrir le parlement aux jeunes pour leur faire découvrir la démocratie représentative mais aussi pour leur permettre de s’exercer à la participation et à la délibération. Je tiens d’ailleurs à saluer les plus jeunes qui sont dans la salle, les élèves du campus du CERIA qui ont collaboré à cette soirée ainsi que ceux qui sont venus nous rendre visite.


En parallèle, je veux initier, avec les membres du Bureau, une réflexion sur une participation citoyenne accrue au niveau de la COCOF. Si la rhétorique xénophobe se nourrit du “eux” versus “nous”, je propose de travailler à la construction d’un “nous”, d’une communauté politique de citoyennes et de citoyens qui ne se limiterait pas à un vote tous les 5 ans.


Jamais, au cours de l’histoire, la population n’a été aussi éduquée qu’aujourd’hui et pourtant, depuis 150 ans, le rôle des citoyennes et des citoyens n’a foncièrement pas évolué. En tant que femmes et hommes politiques, nous nourrissons aussi cette dichotomie en nous considérant comme dépositaire du monopole de l’expertise, en nous passant de l’avis des 99% de la population. Pourquoi ne pas s’inspirer des innovations délibératives d’Irlande, d’Australie, ou plus près de chez nous chez nos amis de la Communauté germanophone, pour réfléchir aux modalités d’institutionnalisation de la participation citoyenne de façon structurelle et beaucoup plus approfondie qu’un simple vote ?


C’est pour mener cette réflexion avec l’ensemble des parlementaires et développer des expérimentations que j’ai engagé une personne spécialisée en innovation démocratique et qui consacrera tout son temps à cette mission. Ces expérimentations devront se dérouler évidemment en complémentarité avec ce qui sera développé dans les autres parlements de la Région. Avec mes collègues Rachid Madrane et Fouad Ahidar, nous comptons travailler ensemble pour développer ces évolutions nécessaires pour une autre démocratie. Travailler en cohérence est d’ailleurs un objectif à poursuivre dans notre Région. On le sait, l’éclatement des compétences entre les différentes entités a un impact négatif pour la population et complique particulièrement le travail des associations et des structures, surtout dans les politiques sociales et de la santé. Il faudra dès lors que notre organisation parlementaire puisse prendre en compte cette réalité et viser la cohérence des débats et des législations.


Alors que de nombreux jeunes de par le monde se mobilisent pour les causes climatiques, les changements nécessaires de notre société ne se réaliseront dans la paix et la sérénité que par le changement de notre fonctionnement démocratique, dans lequel toutes les citoyennes et tous les citoyens sont associés aux prises de décisions. Je suis convaincue que via un processus délibératif, basée sur l’échange d’argumentations, et la co-construction des décisions, l’évolution de notre société pourra se réaliser dans les meilleures conditions. Sans quoi, du brouillard dans lequel nous nous trouvons, nous serions amenés à voyager dans la nuit.




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